Le énième cessez-le-feu n’a pas été respecté, le Conseil de sécurité de l’ONU appelle à des négociations que Kinshasa rejette et l’Angola annonce l’envoi de soldats comme il y a 25 ans : malgré une intense activité diplomatique, le ciel ne s’éclaircit guère sur le front de la rébellion du M23 dans l’est de la RDC.

Gouvernement congolais et diplomates disent encore vouloir « donner une chance » aux processus de paix lancés à Nairobi et Luanda, qui visent l’un à réunir autour d’une table les multiples groupes armés sévissant dans la région, l’autre à faire taire les armes du M23 et à rapprocher le Rwanda de la République démocratique du Congo.

Historiquement compliquées, les relations entre les deux voisins sont exécrables depuis la résurgence fin 2021 du M23 (Mouvement du 23 mars), une rébellion majoritairement tutsi que Kinshasa affirme soutenue par Kigali avec pour objectif de s’accaparer les richesses de l’Est congolais.

« Il n’est plus à démontrer que le Rwanda soutient le M23 », a d’ailleurs déclaré dimanche à Goma, capitale de la province, Nicolas de Rivière, ambassadeur de France auprès des Nations unies, à l’issue d’une visite en RDC d’une délégation du Conseil de sécurité.

Ce soutien rwandais a été corroboré par des experts de l’ONU puis dénoncé par plusieurs chancelleries occidentales, bien que Kigali s’en défende encore.

Le gouvernement congolais demande à la communauté internationale de prendre des sanctions contre le Rwanda pour cette « agression ». Ses interlocuteurs ne l’excluent pas, mais « la sortie de crise ne peut être que politique, elle ne peut être que par la négociation », ont insisté Nicolas de Rivière et son homologue gabonais Michel-Xavier Obiang.

Le Conseil de sécurité « devrait plutôt aller dire au gouvernement rwandaisde retirer ses militaires qui tuent les Congolais et bombardent des cités entières », réagit lundi à Goma Placide Nzilamba, acteur de la société civile du Nord-Kivu. « Ils ne nous apportent pas de solution », estime aussi Mamy Asumini Kayumba, une habitante de Goma. « Ça fait près de 30 ans que nous vivons ces atrocités, il est temps que ça finisse », ajoute-t-elle.

En un an, le conflit avec le M23 a provoqué le déplacement de quelque 800.000 personnes, causant une crise humanitaire majeure.

Le gouvernement congolais prévoyait de consacrer lundi soir son point de presse hebdomadaire à « l’évolution du front diplomatique ». Mais en attendant, fin février encore, son porte-parole Patrick Muyaya affirmait : « Il est hors de question, je le répète, de négocier avec le M23 ».

Position difficile

Face à une rébellion qui agrandit son territoire et n’a aucun intérêt stratégique à cesser le feu, « le Congo est militairement dans une position difficile », relève Reagan Miviri, chercheur à l’institut congolais Ebuteli. Les délégués onusiens ne pouvaient qu’insister sur les négociations.

Mais négocier sur quoi?

« Il est très difficile d’offrir quoi que ce soit au M23 en année électorale », estime le chercheur. Une présidentielle, à laquelle sera candidat le chef de l’Etat sortant Félix Tshisekedi, est prévue en décembre. Intégrer des combattants M23 dans l’armée semble exclu et le faire dans l’administration « serait impopulaire », poursuit Reagan Miviri.

Enfin, surprise du week-end, le gouvernement angolais a annoncé samedi qu’il allait envoyer une unité militaire dans l’est de la RDC, après l’échec du cessez-le-feu qui aurait dû entrer en vigueur mardi dernier, pour « sécuriser les zones où sont stationnés les membres du 23 ».

Aucun autre détail n’a été donné, mais cette annonce a réveillé le souvenir de la guerre de 1998-2002, qui avait impliqué neuf pays africains et failli faire imploser le pays.

Une force régionale, dont des soldats kényans et burundais sont déjà déployés, a été créée par la Communauté des Etats d’Afrique de l’Est (AEC) et doit justement superviser le retrait des combattants du M23. L’arrivée d’Angolais dans le bourbier de l’Est pose donc question.

Pour Kinshasa, cette force régionale devait avoir un mandat « offensif » et contraindre le M23 à se retirer. Mais elle n’a pas affronté les rebelles jusqu’à présent et se retrouve critiquée par les Congolais au même titre que la force de l’ONU présente depuis 23 ans dans le pays, où elle n’est pas parvenue à faire cesser les violences.

AFP

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